La Commission Électorale (CE) de l’Inde a donc voté pour le développement d’un système de vote utilisant la blockchain. Ce nouveau système devrait théoriquement permettre d’améliorer la pratique de la démocratie dans le pays. L’Inde devancera-t-elle les pays occidentaux, qui se voient en « champion de la démocratie », en matière d’amélioration de l’appareil électoral ? La blockchain apportera-t-elle une réelle valeur ajoutée au système de vote en Inde ou est-ce un énième projet bricolé avec en priorité une visée marketing et politique ?
La blockchain pour lever le handicap géographique de l’Inde
Le Commissaire en Chef aux Elections de l’Inde, Sunil Arora, a déclaré le 12 février 2020, lors du Times Now Summit, que la CE était sur le point de résoudre l’un des plus gros problèmes empêchant un grand nombre d’électeurs de voter dans le pays.
La CE collabore avec l’Institut Indien de Technologie de Chennai afin de développer un système de vote utilisant la blockchain, un dispositif qui permettra aux électeurs inscrits d’exercer leur droit de vote et ce, même après avoir déménagé dans une autre ville.
La blockchain devrait donc résoudre ce problème d’ordre spatial qui touche une grande partie des électeurs : Des rapports indiquent que 900 millions de personnes avaient le droit de voter aux élections de 2019, mais un tiers d’entre elles, soit environ 300 millions de personnes, n’ont pas pu voter, faute d’avoir pu se rendre aux urnes, le jour du scrutin.
Plus de 450 millions de personnes ont quitté leur ville natale pour diverses raisons – recherche d’emploi ou prise de poste, poursuite des études, création de nouveaux foyers suite à un mariage, etc.
Il y a toujours un « Mais »
Le Bureau de la Recherche du Sénat de la Californie avait publié, au mois de juin 2019, un rapport contenant des propositions quant à l’utilisation de la blockchain en matière de vote : Stockage sécurisé des listes électorales ou encore possibilité pour les électeurs d’enregistrer leur vote à distance via une application.
Les experts en cybersécurité et en matière électorale restent toutefois sceptiques quant à l’efficacité relative de la blockchain par rapport aux systèmes de vote classiques en ligne. La blockchain ne sécuriserait que le bulletin de vote mais, ne contribue ni à l’authentification des électeurs, ni à la sécurisation des appareils utilisés par les électeurs.
D’autres critiques ont été émises quant à l’impossibilité d’auditer les systèmes de vote en ligne, avec un niveau de confiance comparable à l’audit d’un bureau de vote physique.
Le « Mais » du « Mais » : Les critiques émises contre un système de vote en ligne utilisant la blockchain doivent être considérées comme des propositions d’amélioration que comme des facteurs bloquants. L’application de la blockchain peut très bien être étendue à l’authentification des électeurs. Sunil Arora a d’ailleurs proposé de relier les cartes d’identité des électeurs à Aadhaar – le système d’identification biométrique de la population indienne. Rien n’empêche de mettre le tout en relation à l’aide d’une unique blockchain.
Quant à l’audit d’une blockchain, cette dernière est un livre ouvert accessible à n’importe quel électeur.
Le risque réel concerne la sécurisation de chaque smartphone, tablette ou ordinateur utilisé par les électeurs. A quand une blockchain contre les malwares ?